Mais, vraiment, combien ‘durables’ sommes-nous ?



Voici ma traduction de l'article de Paul Chefurka : No really, how sustainable are we?, daté du 16 mai 2013 et libre de droits d’auteur. 

Bonne lecture !

* * *

Depuis les écrits de Thomas Malthus au début des années 1880, et tout spécialement depuis la publication de La Bombe P (The Population Bomb) par Paul Ehrlich en 1968, nombreux sont les experts qui se sont gratté le crâne en se demandant quelle pourrait bien être la population humaine ‘durable’ (1) à long terme sur la planète Terre.

(1) Traduction habituelle de sustainable. Autres traductions possibles : soutenable, viable.

Cette question est intrinsèquement liée à celle du dépassement écologique (ecological overshoot), si habilement décrit par William R. Catton Jr. dans son livre Overshoot : The Ecological Basis of Revolutionary Change (1980). De combien avons-nous déjà poussé notre population et nos niveaux de consommation au-delà de la capacité porteuse (ou de charge) à long terme de la planète ?

Cet article esquisse mes réflexions actuelles sur la capacité porteuse (carrying capacity) et le dépassement (overshoot), et présente six estimés de la taille d’une population humaine durable.

La capacité porteuse

La capacité porteuse (ou de charge), une expression bien connue en écologie, a un sens évident et passablement intuitif : « La taille maximum de la population d’une espèce que l’environnement peut soutenir indéfiniment – en raison de la nourriture, de l’habitat, de l’eau et autres nécessités disponible dans l’environnement. »


Malheureusement, plus vous la contemplez, plus cette définition devient nébuleuse et controversée, spécialement lorsque vous considérez la capacité porteuse planétaire pour les êtres humains. Les écologistes feront valoir que notre nombre a déjà grandement dépassé la capacité porteuse de la planète, alors que d’autres (notablement, les économistes et les politiciens…) feront valoir que nous n’y sommes pas encore !

Cette confusion peut se manifester parce que nous tendons à confondre deux compréhensions très différentes de l’expression « capacité porteuse ». Dans le cadre de la présente discussion, je nommerai celles-ci la vue « subjective » et les vues « objectives » de la capacité porteuse.

La vue subjective est la capacité porteuse du point de vue d’un membre de l’espèce en question. Plutôt que de provenir d’une évaluation rationnelle, analytique de la situation globale, elle est un jugement fondé sur l’expérience (2). En tant que tel, il tend à être limité à la population de cette même espèce, tout en offrant un horizon temporel limité – la situation présente compte bien davantage que quelque possibilité future. Ce qui importe le plus en cette vue est combien de membres de sa propre espèce seront aptes à survivre afin de se reproduire. Aussi longtemps que ce nombre continue de croître, nous assumons que tout va bien – que nous n’avons pas encore atteint la capacité porteuse de notre environnement.

(2) Ma traduction de an experiential judgment.

De ce point de vue subjectif, l’humanité n’a même pas encore atteint ni même dépassé la capacité porteuse globale de la Terre – après tout, notre population s’accroît encore. Il est tentant d’assigner principalement cette vue aux économistes néoclassiques et aux politiciens, mais, en vérité, la plupart d’entre nous sommes enclins à voir les choses ainsi. En fait, toutes les espèces, humains inclus, ont cette tendance, que ce soit conscient ou non.

Les espèces ont tendance à poursuivre leur accroissement jusqu’à ce que des facteurs extérieurs tels qu’une maladie, des prédateurs, la raréfaction de nourriture ou autre ressource – ou un changement climatique – interviennent. Ces facteurs définissent la capacité porteuse « objective » de l’environnement. Cette vue objective de la capacité porteuse est celle d’un observateur qui adopte une position extérieure à l’espèce en question. C’est le point de vue typique d’un écologiste regardant un reine sur l’Île St-Matthieu ou l’impact de l’humanité sur d’autres espèces et sur sa propre ressource de base (3).

(3) Ma traduction de its own resource base.

C’est cette vue qui est habituellement assumée par les écologistes lorsqu’ils usent de l’expression brute « la capacité porteuse », et c’est une évaluation à laquelle on ne peut parvenir qu’en passant par l’analyse et le raisonnement déductif. C’est la vue que je soutiens, et ses implications à l’égard de notre futur n’ont rien de réconfortant.

Lorsqu’une espèce bute contre les limites posées par la capacité porteuse objective de l’environnement, sa population commence à décliner. L’humanité est maintenant en ce lieu inconfortable où des observateurs objectifs ont détecté notre condition de dépassement, mais la population, en tant que tout, ne l’a pas encore reconnue. En poussant plus fort contre les limites de la capacité porteuse objective de la planète, les choses commencent à aller mal. De plus en plus de personnes ordinaires reconnaissent le problème, ses symptômes devenant plus évidents aux spectateurs occasionnels. Le problème est, bien sûr, que nous avons franchi la capacité porteuse objective de la planète depuis un bon bout de temps.

Une réplique typique à cet argumentaire est que les humains ont « étendu notre capacité porteuse » par l’innovation technologique. « Regardez la Révolution verte ! Malthus avait vraiment tort. Il n’y a pas de limites à l’ingéniosité humaine ! » Lorsque nous disons de telles choses, nous parlons évidemment d’un point de vue subjectif. De ce point de vue expérientiel,  anthropocentrique, nous avons en effet rendu notre environnement apte à nous porter en plus grand nombre. C’est la seule vue qui importe au niveau biologique, évolutif ; il est ainsi peu surprenant que la plupart des membres de notre espèce s’en satisfassent.

Le problème avec ce point de vue est que tout indicateur objectif de dépassement est au rouge. Du changement climatique à l’acidification des océans qui ont pour origines nos cheminées et tuyaux d’échappement, via la déforestation et la désertification qui accompagnent notre expansion de l’agriculture et de notre espace habité, à l’extinction d’espèces non–humaines dans le monde naturel, la planète signale d’urgence une condition de dépassement.

Les humains ont une envie souterraine de croissance, une immense capacité intellectuelle d’innovation et une incapacité biologique à se positionner hors de notre perspective anthropocentrique et chauvine. Cette combinaison a rendu inévitable que nous atterrissions, nous et le reste de la biosphère, dans l’insoluble situation écologique globale actuelle.

Dépassement

Lorsqu’une population dépasse sa capacité porteuse, elle entre dans une condition nommée dépassement. Parce que la capacité porteuse est définie comme la population maximum qu’un environnement peut maintenir indéfiniment, le dépassement doit, par définition, être temporaire. Les populations déclinent toujours à (ou sous) la capacité porteuse. Le temps qu’elles demeurent en dépassement dépend des ressources stockées qui soutiennent l’enflure de leur nombre. Les ressources peuvent être la nourriture, mais elles peuvent aussi être n’importe quelle ressource qui puisse aider à maintenir leur nombre. Pour les humains, l’une des ressources primaires est l’énergie, qu’elle soit puisée à des flux (la lumière solaire, le vent, la biomasse) ou dans des stocks (charbon, pétrole, gaz, uranium, etc.). Une espèce entre habituellement en dépassement lorsqu’elle puise dans la réserve d’une ressource particulièrement riche mais épuisable. Tels que les combustibles fossiles, en l’occurrence…

Dans le règne animal, la croissance démographique tend à suivre une courbe logistique. C’est une courbe en S qui démarre lentement lorsque l’espèce est introduite pour la première fois dans un écosystème qui, à un certain point ultérieur, s’élève très rapidement lorsque la population s’établit et qui, finalement, plafonne lorsque la population sature sa niche.

Les humains ont poussé l’enveloppe de notre courbe logistique pour la majeure partie de notre histoire. Notre population s’est accrue lentement lors des dernières centaines de milliers d’années, alors que nous développions graduellement les habiletés nécessaires à négocier avec nos environnements variés et changeants, particulièrement le langage, l’écriture et l’arithmétique. Développant et disséminant ces habiletés, notre capacité à modifier notre environnement s’est accrue, de même que notre taux de croissance démographique.

Si nous n’avions pas découvert la ressource énergétique stockée des combustibles fossiles, notre courbe de croissance logistique aurait probablement plafonné il y a de cela quelque temps, et nous serions bien en voie d’atteindre un équilibre avec les flux d’énergie du monde qui nous entourent, à peu près comme toutes les autres espèces le font. Notre nombre aurait plafonné pour osciller autour d’un niveau beaucoup plus bas qu’aujourd’hui, comparable à celui atteint, il y a de cela des dizaines de milliers d’années, par les populations de chasseurs-cueilleurs.

Malheureusement, notre découverte du potentiel énergétique du charbon créa ce que les mathématiciens et les théoriciens des systèmes ont nommé « un point de bifurcation » ou ce qui est mieux connu, en certains cas, comme « un point de basculement ».  C’est un point où un système diverge d’un chemin à un autre en raison de quelque influence sur les événements. La face malchanceuse de l’affaire est que les points de bifurcation sont généralement irréversibles. Une fois passé un tel point, le système ne peut revenir à un point antérieur. 

Étant donné l’impact qu’ont eu les combustibles fossiles sur le développement de la civilisation mondiale, leur découverte constitua clairement une telle bifurcation. Plutôt que de s’aplatir en douceur comme la courbe de croissance des autres espèces, la nôtre continua de s’élever. Et s’élève et s’élève encore.

Qu’est-ce qu’un niveau de population durable ?

Nous parvenons maintenant au cœur de notre sujet. D’accord, nous acceptons tous que l’espèce humaine est en dépassement (4). Mais de combien ? Quel est la capacité porteuse de notre planète ? Après tout, les réponses à ces questions définissent une population durable

(4) …de la capacité porteuse de la biosphère.

Sans surprise, les réponses sont assez difficiles à démêler. Différents chiffres ont été avancés, chacun avec son ensemble d’hypothèses explicites et implicites – dont celle, et non la moindre, du niveau de vie standard présumé de l’individu moyen. Pour ceux qui sont familiers avec l’équation de Ehrlich et Holdren I = PAT, si ‘I’ représente l’Impact environnemental d’une population durable, alors pour chaque valeur d’une population ‘P’, il y a une valeur correspondante pour ‘AT’, le niveau d’Activité et de Technologie qui peut être maintenu pour ce niveau démographique (5). Autrement dit, plus notre niveau de vie s’élève, plus bas doit chuter notre niveau démographique pour qu’il soit durable. Ce qui est discuté plus à fond dans un article antérieur : Empreintes thermodynamiques (Thermodynamic Footprints).

(5) Ma traduction de population level (ou nombre d’habitants).

Pour avoir quelque idée de l’énorme spectre d’incertitude des estimations de la durabilité, nous jetterons un coup d’œil à six évaluations, chacune d’entre elles menant à un dénouement fort différent. Nous commencerons avec la plus optimiste et poursuivrons notre chemin vers le bas de l’échelle.

L’évaluation de l’empreinte écologique

Le concept d’empreinte écologique fut développé en 1992 par William Rees et Mathis Wackernagel à l’Université de la Colombie-britannique (6), Canada.

(6) University of British Columbia

L’empreinte écologique est une mesure de la demande humaine sur les écosystèmes de la Terre. C’est une mesure standardisée de la demande pour le capital naturel qui peut être mis en contraste avec la capacité écologique des écosystèmes à se régénérer. Elle représente la somme des surfaces terrestres et marines nécessaire à fournir les ressources qu’une population humaine consomme, et à assimiler les déchets associés. Comme usuellement publiée, cette valeur est une évaluation du nombre de planètes Terre qu’il faudrait pour soutenir l’humanité alors que tous poursuivent leur style de vie.

Elle comporte un nombre de défauts assez flagrants l’amenant à être hyper optimiste. L’« empreinte écologique » vaut fondamentalement et seulement pour les ressources renouvelables. Elle inclut un facteur théorique, mais sous-estimé, pour les ressources non renouvelables. Elle ne tient pas compte des effets du changement climatique qui se déploient, de l’acidification des océans ou de la perte de biodiversité (i.e. l’extinction des espèces). Il est intuitivement clair qu’aucun nombre de ‘planètes supplémentaires’ ne pourrait compenser une telle dégradation.

Pourtant, l’évaluation faite à la fin de 2012 est que notre empreinte écologique globale est d’environ « 1,7 planète ». Autrement dit, il y a au moins 1,7 fois trop d’activité humaine pour garantir la santé à long terme de cette seule et solitaire planète. Pour le formuler encore autrement, nous sommes en dépassement de 70 %.

Il serait probablement juste de dire que, par cette méthode comptable, la population durable serait de 7 / 1,7, soit environ quatre milliards d’individus à notre niveau actuel moyen d’affluence. Comme vous le verrez, d’autres évaluations font que cet estimé ressemble à un heureux fantasme.

L’évaluation du combustible fossile

Le principal accélérant de l’activité humaine lors des derniers 150 à 200 ans a été le combustible fossile. Avant 1800, il y avait très peu de combustibles fossiles d’utilisation courante, la plus grande part de l’énergie étant dérivée du bois, du vent, de l’eau, de la force animale et humaine. Le graphe suivant démontre l’ascension précipitée de l’usage du combustible fossile et, plus spécialement, depuis 1950.


Cette information fut la base de mon analyse précédente : Empreintes thermodynamiques (Thermodynamic Footprints). Cet article investigue l’influence de l’énergie technologique (dont 87 % provient des combustibles fossiles) sur l’impact humain planétaire : de combien multiplie-t-elle l’effet de chaque « singe nu »... Le graphe suivant illustre le multiplicateur en différents points de l’histoire :


Les combustibles fossiles ont alimenté la croissance dans tous les aspects de la civilisation, incluant la  croissance démographique. La « Révolution verte » en agriculture – qui fut démarrée par le Prix Nobel Norman Borlaug à la fin des années 1940 – a été largement insufflée par les combustibles fossiles, s’appuyant sur la mécanisation, l’irrigation motrice et les fertilisants synthétiques dérivés des combustibles fossiles. Cette croissance énorme en production alimentaire soutint une hausse rapide de la population via une boucle de rétroaction écologique classique : plus de nourriture (offre) => plus de population (demande) => plus de nourriture => plus de population, etc.

Au fil des décennies centrales de la révolution verte, de 1950 à 1980, la population mondiale a presque doublé, passant de moins de 2,5 milliards à plus de 4,5 milliards. La croissance moyenne de la population au cours de ces trois décennies a été de 2 % par an. Comparez cela aux 0,5 % de 1800 à 1900, 1,00 % de 1900 à 1950, et de 1,5 % à partir de 1980 jusqu’à maintenant :


Cette analyse rend tentante de conclure qu’une population durable pourrait ressembler à celle de 1800, avant la Révolution verte, et avant l’adoption globale des combustibles fossiles : environ 1 milliard d’individus vivant d’environ 5 % de l’énergie globale moyenne aujourd’hui consommée.

C’est tentant (en grande partie parce que cela semble vaguement possible), mais malheureusement, ce nombre (d’individus) est peut-être encore trop élevé. Même en 1800, les signes de dépassement démographique étaient clairs, si ce n’est bien reconnus : il y avait déjà un déboisement généralisé à travers l’Europe et le Moyen-Orient, et la désertification s’était installée dans les zones agricoles précédemment luxuriantes de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient.

Sans oublier que si nous avions démarré avec « seulement » un milliard d’individus, un taux de croissance annuel d’à peine 0,5 % ramènerait la population à plus de sept milliards en seulement 400 ans. À moins que le taux de croissance puisse être maintenu très près de zéro, une telle situation est décidément non durable.

L’évaluation de la densité démographique

Il y a une autre façon d’aborder la question. Si nous supposons que l’espèce humaine fut durable à un certain moment dans le passé, quel moment pourrions-nous choisir et quelles conditions contribuèrent alors à notre développement apparemment durable ?

J’utilise une définition très stricte de la durabilité. Elle se lit à peu près ainsi : « La durabilité est la capacité d’une espèce à survivre à perpétuité sans endommager l’écosystème planétaire lors du processus (de survie de l’espèce). » Ce principe ne s’applique qu’aux propres actions d’une espèce, et non de forces externes incontrôlables – tels les cycles de Milankovitch, les impacts d’astéroïdes, la tectonique des plaques, etc.

Afin de trouver une population pour laquelle j’étais assez confiant qu’elle rencontre ma définition de la durabilité, j’ai dû chercher bien loin dans l’histoire – en fait, à l’époque paléolithique. Les conditions de durabilité que j’ai choisies étaient : une densité de population très faible et une très faible utilisation de l’énergie, toutes deux maintenues sur plusieurs milliers d’années. J’ai aussi supposé que la population utiliserait autant d’énergie que celle de chasseurs-cueilleurs typiques : environ deux fois la quantité journalière d’énergie qu’une personne obtient de la nourriture qu’ils mangent.

La surface de la planète Terre fait environ 150 millions de kilomètres carrésdont 60 millions de kilomètres carrés proprement terrestres. Toutefois, deux tiers de cette dernière surface sont couverts par la neige, les montagnes ou les déserts, ou n’ont pas ou à peu près de terre arable. Ce qui laisse environ 50 millions de kilomètres carrés (20 millions de miles carrés) habitables par l’homme sans hauts niveaux de technologie.

Une densité démographique typique d’une société non énergétiquement assistée de chasseurs-cueilleurs-jardiniers se situe entre 1 personne par mile carré et 1 personne par kilomètre carré. Parce que les humains vivant de cette façon ont occupé l’ensemble de la planète avant que l’agriculture n’ait été inventée il y a 10 000 ans, ce nombre cheville une limite supérieure raisonnable pour une population mondiale durable dans une fourchette de 20 à 50 millions de personnes.

Je me suis fixé sur la moyenne de ces deux nombres : 35 millions de personnes. C’est que ce nombre correspond aux densités connues des populations de chasseurs-cueilleurs, et que ces densités se sont maintenues avec pratiquement zéro de croissance (moins de 0,01 % par an) au cours des 67 000 années de l’époque de la super éruption du volcan Toba en 75 000 av. J.-C. jusqu’à 8 000 av. J.-C. (Jour de l’Agriculture sur la planète Terre).

Si nous devions disperser uniformément notre population actuelle de 7 milliards d’habitants sur 50 millions de kilomètres carrés, nous aurions une densité moyenne de 150 habitants au kilomètre carré. Basé uniquement sur ce nombre, et sans même tenir compte de nos activités énergétiques modernes, notre population actuelle est au moins 250 fois trop imposante pour être durable. Pour le dire autrement, nous sommes maintenant en dépassement de 25 000 % – si l’on se base seulement sur nos nombres bruts de population.

Comme je l’ai dit plus haut, nous devons également prendre en compte le niveau de vie de la population. Notre utilisation de l’énergie technologique confère à chacun de nous l’impact planétaire moyen d’environ 20 chasseurs-cueilleurs. Quelle serait la population durable si chaque personne gardait son mode de vie actuel, qui est actuellement donné comme une Empreinte Thermodynamique moyenne (TF) de 20 ? (7)

(7) TF pour Thermodynamic Footprint

Nous pouvons trouver le nombre d’une population mondiale durable pour tout niveau d’activité humaine en utilisant la formule I = PAT précédemment mentionnée.

• Nous avons donc décidé que la population maximale de chasseurs-cueilleurs que nous pourrions accepter comme durable serait de 35 millions de personnes, chacune avec une empreinte thermodynamique de 1.

• Tout d’abord, nous avons réglé I ( l’impact total admissible pour notre population durable ) à 35, représentant ces 35 millions de chasseurs-cueilleurs.

• Ensuite, nous avons réglé AT pour être le TF représentant le style de vie moyen souhaité pour notre population. Dans ce cas, ce nombre est de 20. (Voir quatre paragraphes plus haut.)

• Nous pouvons maintenant résoudre l’équation pour P. En utilisant une algèbre simple, nous savons que I = P x AT est équivalent à P = I / AT. En utilisant cette forme de l’équation, nous y substituons nos valeurs, et nous trouvons que P = 35 / 20. Dans ce cas, P = 1,75.

Ce nombre nous dit que si nous voulons garder le niveau moyen de consommation par habitant dont nous jouissons dans le monde d’aujourd’hui, nous entrerions dans une situation de dépassement par delà une population mondiale d’environ 1,75 million de personnes. Par cette mesure, notre population actuelle de 7 milliards est environ 4 000 fois trop grande et active pour une viabilité de long terme. En d’autres termes, par cette mesure, nous sommes maintenant 400 000 % en dépassement.

En utilisant la même technique, nous pouvons calculer que d’atteindre une population durable ayant un style de vie américain (TF = 78) permettrait une population mondiale de seulement 650 000 personnes – clairement insuffisante pour maintenir une civilisation mondiale moderne.

Par souci de comparaison, on estime que la population du monde historique, juste après l’aube de l’agriculture en 8 000 av. J.-C. était d’environ 5 millions et, en l’an 1, elle était d’environ 200 millions. Nous avons traversé le seuil supérieur de la durabilité planétaire aux environs de 2 000 av. J-C, et nous nous sommes enfoncés dans le dépassement depuis les 4 000 dernières années.

Les évaluations écologiques

En tant qu’espèce, les êtres humains ont beaucoup en commun avec d’autres grands mammifères. Nous respirons, mangeons, nous déplaçons pour trouver de la nourriture et des partenaires, socialiser, nous reproduire et mourir comme toutes les autres espèces de mammifères. Notre intellect et la culture, ces qualités qui nous font spécifiquement humains, sont de récents ajouts à notre nature essentielle de primate, au moins en termes d’évolution.

Par conséquent, il est logique de comparer le rendement de notre espèce à celle d’autres espèces similaires – des espèces que nous savons pour sûr être durable. J’ai eu la chance de trouver le travail du biologiste marin américain Dr Charles W. Fowler, qui a un profond intérêt pour la durabilité et l’énigme écologique posée par les êtres humains. Les trois évaluations (8) suivantes sont tirées de l’œuvre du Dr Fowler.

(8) Ma traduction de assumption(s), qui pourrait aussi se traduire par estimé, estimation, hypothèse. Mais ‘hypothèse’ n’aurait guère de sens dans le contexte plus large des propos qui suivent.

Première évaluation

En 2003, le Dr Fowler et Larry Hobbs ont co-écrit un document intitulé Is humanity sustainable?” (9) qui a été publié par la Royal Society. Ils y ont comparé une variété de mesures écologiques prises au sein de 31 espèces, dont les humains. Ces mesures incluaient la consommation de biomasse, la consommation d’énergie, la production de CO2, la taille géographique des espaces occupés, et la taille de la population.

(9) "L’humanité est-elle durable ?"

Sans grande surprise, dans la plupart des comparaisons les humains avaient un beaucoup plus grand impact que d’autres espèces – et ce, à un niveau de fiabilité de 99 %. Lorsqu’ils en vinrent à la taille de la population, Fowler et Hobbs trouvèrent qu’il y a, par plus de deux ordres de grandeur, plus d’êtres humains que l’on peut attendre sur la base d’une comparaison avec d’autres espèces – 190 fois plus, en fait. De même, nos émissions de CO2 surpassent celles des autres espèces par un facteur de 215.

Sur la base de cette recherche, le Dr Fowler conclue qu’il y a environ 200 fois trop d’humains sur la planète. Ceci qui nous amène une estimation de 35 millions de personnes pour une population durable.

C’est la même que la limite supérieure établie ci-dessus qui examinait les densités de population de chasseurs-cueilleurs. La similitude des résultats n’est pas trop surprenante, puisque les chasseurs-cueilleurs d’il y a 50 000 ans étaient à peu près aussi proches des « singes nus » que les humains l’ont été dans l’histoire récente.

Seconde évaluation

En 2008, cinq ans après la publication citée ci-dessus, le Dr Fowler a écrit un autre article intitulé “Maximizing biodiversity, information and sustainability” (10). Dans cet article, il a examiné la question de la durabilité du point de vue de la maximisation de la biodiversité. Autrement dit, quelle est la plus grande population humaine qui ne réduirait pas la biodiversité planétaire ?

(10) "Maximiser la biodiversité, l’information et la durabilité"

Il s’agit, bien sûr, d’un test très strict, et que nous avons probablement échoué au début de notre histoire en extirpant la mégafaune dans le sillage de nos migrations à travers un certain nombre de continents.

Dans cet article, le Dr Fowler a comparé 96 espèces différentes et les a encore analysé en termes de population, d’émissions de CO2 et de modèles de consommation.

Cette fois-ci, lorsque le test (ou critère) strict de rétention de la biodiversité a été appliqué, les résultats furent vraiment choquants, même pour moi. Selon cette mesure, les humains ont surpeuplé la Terre par près de 700 fois. Afin de préserver le maximum de biodiversité sur Terre, la population humaine ne peut pas être de plus de 10 millions de personnes – chaque individu ayant le profil de consommation d’un  chasseur-cueilleur paléolithique. 

Addendum : troisième évaluation

Après que cet article ait été initialement, le Dr Fowler m’a transmis une copie de l’annexe de son livre de 2009, Systemic Management : Sustainable Human Interactions with Ecosystems and the Biosphere(11) publié par Oxford University Press. Il y décrit encore une autre technique pour comparer les humains avec d’autres espèces de mammifères, cette fois en termes de densités observées de population, de taille et d’étendue totales de population.

(11) La gestion systémique : interactions humaines durables avec les écosystèmes et la biosphère

Après nous avoir attentivement comparés à diverses espèces d’herbivores et de carnivores de taille corporelle similaire, il tire cette conclusion dévastatrice : la population humaine est environ 1 000 fois plus importante que prévu. Ceci est en ligne avec la deuxième évaluation ci-dessus, même si environ 50 % plus pessimiste. Elle positionne une population humaine durable à environ 7 millions.

Yeurk !

Conclusions

Comme vous pouvez le voir, les estimations pour une population humaine durable varient grandement : d’un facteur 500, de la plus haute à la plus basse.


L’empreinte écologique ne semble pas vraiment conçue comme une mesure de la durabilité. Son intérêt principal est d’offrit aux personnes non familières avec l’écologie quelque compréhension du fait que nous surexploitons vraiment notre planète. (Elle a aussi l’avantage psychologique de se présenter comme réalisable avec juste un peu d’effort.) En tant que mesure de la durabilité, elle n’est pas utile.

Comme je l’ai dit plus haut, le nombre suggéré par l’empreinte thermodynamique ou l’analyse des combustibles fossiles n’est pas très utile non plus : même une population d’un milliard de personnes sans combustibles fossiles étaient déjà en dépassement.

Cela nous laisse avec quatre estimations : deux à 35 millions, une de 10 millions et une de 7 millions.

Le nombre central de 35 millions de personnes est confirmé par deux analyses fondées sur des données et hypothèses différentes. Ma conclusion est que c’est probablement la plus grande population humaine qui pourrait être considérée comme durable. Le nombre réaliste – et irréalisable – est probablement plus en ligne avec les deux estimations basses, quelque part sous les 10 millions.

Je pense que les deux plus basses estimations (Fowler 2008 et Fowler 2009) sont aussi irréalistes – car trop élevées – que toutes les autres, principalement parce que l’intelligence humaine et la capacité de résolution de problèmes font de notre impact destructeur sur la biodiversité une issue jouée d’avance. Après tout, nous avons mené d’autres espèces à l’extinction il y a 40 000 ans, lorsque notre population totale était estimée à moins de 1 million.

Donc, que pouvons-nous faire de cette information ? Il est évident que nous ne réduirons pas et ne pouvons probablement pas réduire volontairement notre population de 99,5 % à 99,9 %. Même une réduction involontaire de cette ampleur entraînerait d’énormes souffrances et un résultat très incertain : notre nombre serait si proche de zéro que si Mère Nature clignait des yeux, nous disparaîtrions.

En fait, l’analyse suggère que l’Homo sapiens est une espèce intrinsèquement non durable. Ce résultat semble pratiquement garanti par notre néocortex, par l’intelligence même qui a permis notre ascension vers une domination sans précédent de la biosphère de notre planète. L’intelligence est-elle une impasse évolutive ? Du point de vue singulier de notre propre espèce, il est assez probable que oui. Si nous voulons découvrir un plus haut sens ou un avenir plus prometteur à l’intelligence dans l’univers, nous pourrions être forcés de regarder par delà nous-mêmes et adopter une perspective cosmique plutôt qu’humaine.

Discussion

Comment pouvons-nous sortir de ce pétrin?

Comment pourrions-nous aller de là où nous en sommes aujourd’hui à une population mondiale durable d’environ 35 millions ? Nous devrions probablement rejeter la notion de « gérer » un tel déclin démographique. Si nous ne pouvons même pas obtenir de notre population qu’elle cesse de croître, sa réduction pure et simple de plus de 99 % n’est tout simplement pas dans les cartes. Les gens semblent pratiquement incapables de prendre ce type de décision en de grands ensembles sociaux. Nous pouvons décider de cesser de nous reproduire, mais seulement en tant qu’individus ou (peut-être) en petits groupes. Sans le large et essentiel soutien social, de tels choix personnels feront très peu de différence sur le résultat final. Les politiciens, en vaste majorité, ne proposeront même pas une idée telle que « le déclin contrôlé de la population » – pas s’ils veulent accéder ou demeurer au pouvoir, en tout cas. Nonobstant la courageuse expérience de la Chine avec les familles à enfant unique, toute baisse de la population mondiale sera purement involontaire.

Effondrement ?

Un déclin de la population mondiale serait (sera) déclenché et alimenté par la rencontre de notre civilisation avec des limites. Ces limites peuvent apparaître dans n’importe quel domaine : l’accélération du changement climatique, les phénomènes météorologiques extrêmes, la diminution des ressources alimentaires, l’épuisement de l’eau douce, la diminution des approvisionnements en énergie, les pandémies, les déchirures dans le tissu social en raison d’une complexité excessive, les ruptures de la chaîne d’approvisionnement, les défaillances du réseau électrique, un effondrement du système financier international, les hostilités internationales – la liste des candidats est sans fin, et leurs interactions sont beaucoup trop complexes à prévoir.

En 2007, peu de temps après que j’aie compris le concept et les implications du pic pétrolier, j’ai écrit mon premier article web sur le déclin démographique : Population : The Elephant in the Room” (12).  J’y ai esquissé l’image d’un effondrement monolithique de la population : une baisse linéaire des 7 milliards d’habitants d’aujourd’hui à seulement 1 milliard à la fin de ce siècle.

(12) “Population : l’éléphant dans la pièce”

Le temps passant, cette vision dystopique particulière a quelque peu perdu ma confiance. Il me semble maintenant que les êtres humains peuvent être un peu plus endurants que cela. Nous nous battrions comme des démons pour arrêter le film, même si, lors de cet effort, nous ferions, potentiellement, beaucoup plus de dégâts à l’environnement. Nous tenterions de toutes nos forces de nous accrocher à la civilisation et de retrouver notre gloire passée. Différentes situations physiques, environnementales et sociales dans le monde entier généreraient des résultats d’une grande diversité à l’échelle des régions. Pour le dire clairement, une simple « glissade dans l’oubli » n’est pas dans les cartes pour toute espèce qui put récupérer de l’éruption volcanique géante du Toba en seulement 75 000 ans.

Ou débouler ?

Pourtant, il y a ces limites physiques que j’ai mentionnées ci-dessus. Elles se profilent, toujours plus proches, et il semble inéluctable que nous allons commencer à les rencontrer pour de vrai dans la prochaine décennie ou la suivante. Afin de dresser un tableau légèrement plus réaliste de ce qui pourrait alors arriver, j’ai créé l’expérience de pensée suivante sur le déclin démographique involontaire. Elle est basée sur l’idée que notre population ne s’effondrera pas simplement, mais oscillera (déboulera) dans une série de marches d’escalier : première chute alors que nous crevons les limites de la croissance, puis une chute sous elles ; puis récupération partielle… pour chuter à nouveau ; récupération partielle, chute ; récupération...

J’ai amorcé le scénario avec une  population mondiale de 8 milliards d‘habitants en 2030. J’ai posé l’hypothèse que chaque cycle complet de déclin et de récupération partielle prendrait six générations, ou 200 ans. Il faudrait trois générations (100 ans) pour compléter chaque baisse, puis trois autres pour la récupération, pour un temps de cycle total de 200 ans. J’ai supposé que chaque baisse éliminerait 60% de la population existante sur ses cent ans, alors que chaque augmentation subséquente n’ajouterait que la moitié de la population perdue.

En dix cycles complets (2 000 ans), nous serions de retour à une population durable d’environ 40–50 millions. La plus forte chute aurait lieu dans les 100 premières années, de 2030 à 2130, lorsque nous perdrions 53 millions de personnes par année. Même que si ce n’est qu’une perte de 0,9 % par an, par rapport à la croissance nette actuelle de 1,1 %, cela demeure aisément concevable, et pas nécessairement catastrophique – au moins pour commencer.

En tant que scénario, il semble beaucoup plus probable qu’une seule chute monolithique à moins d’un milliard d’individus. Voici à quoi il ressemble :


Il est important de se rappeler que ce scénario n’est pas une prédiction. C’est une tentative de dépeindre un chemin possible au bas de la colline démographique, chemin qui semble un peu plus probable qu’un simple « Boum ! Tout le monde meurt. »

Il est également important de se rappeler que le déclin pourrait se produire tout autrement. Avec le changement climatique qui se prépare à pousser l’humanité dans les escaliers, et la forte possibilité que la température mondiale globale augmentera de 5 ou 6 degrés Celsius avant même la fin de ce premier cycle de déclin, de mon point de vue, nos perspectives ne semblent pas même « bonnes ».

Rassurez-vous, je ne cherche pas à présenter ce 35 millions d’individus comme une sorte de « population cible ». Ceci fait simplement partie de ma tentative de formuler ce que nous faisons à la planète, en termes de ce que certains d’entre nous considèrent comme le niveau de tolérance de l’écosphère planétaire à nos abus.

L’autre potentiel implicite dans cette analyse, c’est que si nous déclinions de 8 à moins de 1 milliard, nous pourrions alors devenir une population en chute libre. Conséquemment, nous pourrions continuer à décliner jusqu’à ce que nous ayons touché à nouveau le fond des gorges d’Olduvai. Mes chiffres sont une tentative de définir combien d’individus pourraient s’écarter d’un tel atterrissage en catastrophe. Certaines personnes semblent croire qu’un tel événement pourrait être gérable. Je ne partage aucunement cette croyance. Ces calculs sont ma façon de passer ce message.

Je suppose que si j’ai à tracer une ligne dans le sable, je vais le faire au nom de toute la vie, et pas seulement de notre mode de vie.

Que peut-on faire ?

Pour être absolument clair, après dix ans d’enquête sur ce que j’appelle affectueusement « L’éclatement global » (13), je ne pense pas que cela puisse être évité, atténué ou géré d’aucune manière. Si et quand ça arrivera, cela suivra sa propre dynamique, et la force des événements pourrait aisément faire ressembler les tsunamis japonais et d’Andaman à d’agréables journées à la plage.

(13) Ma traduction timide de The Global Clusterfuck. ;-)

Les préparatifs les plus efficaces que nous pouvons faire le seront tous par des particuliers et de petits groupes. Ce sera à chacun de nous de décider ce que nos compétences, ressources et motivations nous appellent à faire. Ce sera différent pour chacun de nous – même pour les personnes habitant le même quartier, et bien davantage pour des individus habitant des faces opposées du globe.

Je dis depuis quelques années que chacun de nous fera ce qu’il semble approprié aux circonstances, en quelque partie du monde qu’il peut influencer. Le résultat de nos actions est finalement imprévisible, car il dépend de la façon dont les efforts de l’ensemble des 7 milliards d’entre nous convergent, coopèrent et se font concurrence.

Le résultat final sera très différent d’un endroit à l’autre : les impacts des changements climatiques varieront, les ressources varient, les structures sociales varient, les valeurs et les croyances sont différentes d’un bout à l’autre monde. Le mieux que nous puissions faire est de faire de notre mieux.

Voici mes conseils :

Restez attentif à ce qui se passe autour de nous.

Ne vous laissez pas accrocher par les « vous devriez, vous ne devriez pas » d’autrui.

Parfois, examinez à nouveau nos valeurs personnelles. Si elles ne sont pas en harmonie avec ce que nous pensons de ce que le monde a besoin, modifiez-les.

Cessez de blâmer les gens. Les autres sont tout autant des victimes de notre temps que nous le sommes – et même les chefs de direction et les politiciens.

Blâme, colère et indignation sont inutiles. Ils gaspillent une énergie précieuse dont nous aurons besoin pour un travail plus utile.

Riez beaucoup, à propos de tout – vous-même inclus.

Prenez toutes les diverses croyances du monde et les « ismes » à la légère, y compris les vôtres.

Pardonnez aux autres. Pardonnez-vous. Pour tout.

Aimez tout aussi profondément que vous le pouvez.

C’est ce que je pense pouvoir être utile. Si nous nous acquittons ainsi de ces choses très personnelles, alors faire les trucs physiques liés à la nourriture, l’eau, le logement, les transports, l’énergie, la politique et le reste suivront aisément – ou au moins un peu plus aisément. Et nous aurons beaucoup plus de plaisir à le faire.

Je vous souhaite la meilleure des chances !


Bodhi Paul Chefurka, 16 mai 2013.
paul.chefurka@gmail.com

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