Pétrole, charbon, gaz, nucléaire et énergies renouvelables : options et échéances


Alex commentait ainsi mon article du 29 novembre : Pétrole / AIE : approvisionnement adéquat de 10 ans au lieu de 20...

Attention ! Quand on parle d'approvisionnement adéquat, il s'agit d'une offre capable de soutenir la demande à prix concurrentiel. Alors, du pétrole il y en aura encore pour longtemps. Cependant, qui pourra se le payer à 3, 4, 5, 7$ le litre? 

On semble devoir consommer une option au maximum avant de pouvoir considérer une alternative. Comme mode de pensée, c'est plutot limité...

Dans le cas du charbon, on parle d'environ 200 ans, mais ca pourrait aller plus vite, dépendamment des réserves de pétrole et de gaz.

Pour le combustible nucléaire, on parle d'environ 100 ans.

Peut-être devrait-on commencer dès aujourd'hui à travailler sur des alternatives et cesser le plus rapidement possible l'exploitation de ces énergies très polluantes; de toute façon, un jour ou l'autre nous y serons confrontés.

Alex

* * *

Merci pour ces précisions, Alex. Je te sais bien informé.

Mais je réfléchis... Que peut bien vouloir dire «une offre capable de soutenir la demande à prix concurrentiel»? La demande sera toujours présente tant qu'il y aura du pétrole exploitable... à un prix concurrentiel, concurrentiel en regard des autres options (substituts potentiels) que tu mentionnes (charbon, gaz, nucléaire) et non mentionnées (hydro-électricité, biomasse, éolienne, solaire, géothermique et marémotrice).

Comme tu le sais si bien, le pétrole et le gaz peuvent être distribués à faible coût : un tanker, un oléoduc, un gazoduc, un camion avec réservoir adéquat et une pompe à essence (ou à gaz), électrique ou manuelle, assurent une large distribution à bas prix. Mais, comme tu en fais la remarque, «qui pourra se le payer» à un prix concurrentiel... exorbitant si ce ne sont de richissimes individus, des compagnies et... des pays - pour des raisons, pour le moins évidentes, de sécurité nationale?!

À la limite, et cette hypothèse ne me semble pas déraisonnable, on peut envisager que les pays les plus puissants, sur les plans économique et... militaire, s'entendront pour plafonner hors marché le prix du pétrole... jusqu'à sa dernière goutte "économiquement" exploitable par les compagnies gazières et pétrolières. Et la plupart, faute d'une entente à l'amiable avec les états concernés, seront tout bonnement nationalisées pour des raisons de sécurité économique nationale. Et les véhicules militaires carbureront encore bien longtemps au pétrole, j'en suis convaincu !

1. Si le gaz peut servir de combustible à des usages industriel, commercial et résidentiel, nos véhicules ne sont pas adaptés au gaz. Ils sont hybrides ou électriques. Et je ne suis pas sûr que cette option soit très sûre sur nos routes... En Amérique du Nord, certains véhicules fonctionnent à l'éthanol ou au méthanol. Mais l'approvisionnement de ce carburant est dépendant de la production de biomasse, c'est-à-dire d'une culture (de maïs ou autres) qui mobilise de vastes superficies agricoles. Or, le problème de la bouffe pour les 9 milliards d'habitants attendus pour le party de l'an 2050 n'est toujours pas résolu...

2. À la tonne, le charbon est moins énergétique que le pétrole et le gaz. Pas question de le faire transiter par oléoduc, à moins de le liquéfier. Et pour le liquéfier, il faut de l'énergie... Et il faut tout de même d'abord le livrer à l'usine de liquéfaction. Il doit donc être transporté par des trains et des navires qui carburent, pour leur vaste majorité, au pétrole. Cette option n'est rentable que sur une base régionale : quelques centaines de kilomètres. Au-delà, on brûle son équivalent en pétrole lors de sa livraison...

Or, le charbon n'est pas uniformément distribué sur la planète, ni au sein d'un même vaste pays, tel que les États-Unis, par exemple. On pourrait toujours, sur une base toujours régionale, le transporter par train. Certains pays européens ont depuis longtemps électrifié leurs trains, mais ils n'ont plus de charbon depuis belle lurette... Si l'électricité nous coûte moins cher ici, en Amérique, du moins, dans certaines de ses régions, la densité de notre population ne nous permet toutefois pas de rentabiliser cette option, c'est-à-dire électrifier nos trains pour transporter le charbon.

D'autre part, un autre problème se pose en bout de ligne : il ne peut servir de combustible brut que dans les centrales thermiques. À moins que nous ne retournions au train et au navire à vapeur, c'est-à-dire au charbon. Mais le prix du charbon n'est plus ce qu'il était, n'est-ce pas?

3. Pour le nucléaire, se pose non pas le problème de transport de son combustible, mais de l'usage en bout de ligne qui en est fait : même problème que pour le charbon et, dans une moindre mesure, pour le gaz. Si certains navires de guerre carburent au nucléaire, il n'en va pas de même de nos trains, camions, etc. Et heureusement ! Se pose aussi le problème du stockage sécurisé - non encore résolu de façon pleinement satisfaisante - des déchets nucléaires. En Amérique du Nord, les nombreuses mines creusées dans le Bouclier canadien feraient fort bien l'affaire... à la condition que leurs accès en soient bien gardés par des Amérindiens coopératifs et sensibilisés à une telle mission lors des prochains... 200 000 ans ! Le temps de voir arriver et passer la prochaine glaciation, quoi. Et, à l'échelle humaine, 100 ans, c'est vite passé, non? Alors... après 100 ans, on fait quoi?

4. L'hydro-électricité peut alimenter les véhicules légers (via des piles), les trains, métros et tramways via des lignes dédiées. Mais ni les camions lourds ni les navires. Alors, combien de Baie-James nous faudra-t-il encore construire pour recharger les piles de nos voitures électriques durant nos nuits nordiques? Faudrait faire le calcul... et se mettre au boulot au plus tôt. Quand aux pays dépourvus de hauts-reliefs et de pluies annuelles suffisantes... Too bad !

5. Il reste, comme option, les énergies renouvelables : biomasse, éolienne, géothermique, marémotrice et  solaire. Et tu sais, tout comme moi, ce qu'il en est. Elles ne suffiront pas à la demande actuelle croissante si les autres ressources énergétiques sont épuisées ou sur le point de l'être ou, évidemment, en raison de leur prix prohibitif : il y a une limite à ce qu'un individu peut et veut bien payer pour un bien plus ou moins transformé et transporté ! Point à la ligne. Alors, si les énergies alternatives passent un jour du statut «alternatif» au statut «principal», c'est sans nul doute parce que nous aurons... "épuisé" toutes les autres options. Ce n'est sans doute pas pour demain... mais bien pour après-demain.

Une chose est cependant certaine : le temps de l'abondance d'énergie "à bas prix" (quelle que soit sa forme) est révolu. Et il faudrait donc commencer à planifier sérieusement notre avenir à moyen et  long terme en regard de la survenue inévitable de l'absence de gaz, de pétrole et d'uranium, non? Et je crois que, scénario anarcho-catastrophique mis à part (mais non ignoré), l'espèce humaine toute entière n'aura pas d'autre choix que la décroissance contrôlée de sa population : les écosystèmes qui nous abreuvent en eau et en bouffe ont des limites auto-régénératrices connues... et qui peuvent certainement être encore améliorées via diverses techniques agricoles, halieutiques, d'irrigation, de conservation, de réutilisation, etc. Mais, les limites tant techniques que biologiques ne peuvent être indéfiniment repoussées... Et, de toute façon, à quel prix?

9 000 000 000 d'êtres humains en l'an 2050? Je suis de moins en moins convaincu que nous atteindrons et que nous dépasserons ce chiffre si joliment rond...

En ce qui a trait à l'exploitation potentielle des énergies renouvelables d'ici 2020, je vous invite à consulter le contenu de ce site...

Ce matin, la première neige tombait au pied de mon sous-sol douillet...


Bonne lecture, bonnes réflexions et A+

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