Pétrole / La transition de nos sociétés vers les énergies renouvelables : amorce d'une réflexion



Illustration de l'écopolis de Dongtan
(République populaire de Chine)
Elle devrait voir le jour en 2010.
500 000 personnes en 2050.

Alex et moi poursuivons ici nos échanges épistolaires sur diverses problématiques énergétiques actuelles et futures... Vous pouvez, chers lecteurs et lectrices, en remonter le fil en fouillant dans les Archives des derniers jours.

* * *
Bonjour Paul !

Voici quelques commentaires pour ton blog.

Le pétrole restera concurrentiel tant que les coûts d'exploita-tion resteront suffisamment bas et que le bilan énergétique de l'extraction d'un baril de pétrole sera positif : s'il en coûte 1 équivalent de baril de pétrole pour extraire, transformer et transporter un baril de pétrole, l'exploitation pétrolière n'a plus de sens.

Ainsi, puisque les données liées au transport et à la transformation changent peu, c'est au plan de l'extraction que le bilan énergétique (et monétaire) se joue. Par exemple, extraire sous les fonds marins ou extraire sur terre, mais à l'intérieur de gisements déjà diminués, nécessite beaucoup d'énergie et d'argent (et d'eau, ce qui est un autre sujet que je n'aborderai pas maintenant).

Les prix seront toujours maintenus au maximum de ce que le plus grand nombre de personnes sont désireuses et aptes à payer. Évidemment, un jour, ce nombre ira décroissant, mais la diminution progressive des sources de pétrole aisément exploitables pousseront inévitablement les prix à la hausse.

Pour ce qui est de la nationalisation des compagnies de pétrole, je ne gagerais pas ma chemise là-dessus. Les plus grandes réserves étant en Arabie Saoudite et au Canada, deux états "américanisés" à part entière, il est peu probable que les compagnies soient un jour forcées de vendre leurs actifs aux gouvernements canadien ou saoudien.

Dans le cas du charbon, son utilisation est à proscrire le plus rapidement possible. Sa combustion émet beaucoup de CO2 (sans parler du SO2 qui formera des pluies acides et autres polluants atmosphériques).

Pour être le plus efficace possible, le charbon devrait être brûlé sur son lieu même d'extraction et transformé directement en électricité. Différentes compagnies travaillent sur le captage des gaz à la sortie des cheminées. L'avenir nous dira si cette technologique s'avère rentable. Cependant, nous savons déjà qu'elle s'avère nécessaire si nous désirons poursuivre sur cette voie.

Lorsque tu abordes la question des voitures à piles (j'adore cette question !), tu loupes un aspect important, trop souvent oublié : les piles sont à base de lithium. Or le lithium est un matériau existant en quantité finie (comme toute bonne chose d'ailleurs). Si l'on convertissait l'ensemble des véhicules existants en véhicules électriques, il y aurait suffisament de lithium pour produire des piles pendant.... 15 ans.  Tout juste le temps de faire un beau « road trip » ! C'est encore une solution temporaire, et qui soulève un problème beaucoup plus large d'urbanisme, de mode de vie, d'économie... Bref, le défi olympien de tout environnementaliste qui se respecte !

Concernant les énergies renouvelables, je ne suis pas d'accord avec toi. Les énergies renouvelables, exploitées à leur maximum et de façon intelligente et créative, alliées à des politiques d'économie d'énergie et un changement de mode de vie seraient amplement suffisantes pour subvenir à nos besoins. Je n'ai plus le nom de la publication, mais il y a 2 mois je suis tombé sur un article allemand qui modélisait la croissance économique de la Chine et établissait un modèle de production énergétique basée sur l'énergie éolienne seulement. En exploitant au maximum ses ressources éoliennes, la Chine pourrait s'y s'alimenter entièrement et soutenir sa croissance économique jusqu'en 2035. C'est non négligeable.

Le réel problème derrière les énergies renouvelables est le faible coût des alternatives telles que le pétrole, le gaz, le charbon...  Or, si ces énergies sont si abordables, c'est parce que les coûts environnementaux d'utilisation de ces énergies sont externalisés... dans l'environnement justement. Qui paye lorsque du CO2 est émis dans l'atmosphère? Personne, et c'est là tout le problème. Lorsque l'on se débarrasse d'un vieux frigo en bordure d'une autoroute (Ne faites jamais cela !), c'est l'environnement qui paye. Par contre, lorsqu'on l'envoie à l'enfouissement, on paye environ 11$ la tonne. Une bourse du carbone sérieuse pourrait atténuer en partie ce problème majeur et réajusterait à la hausse le coût des énergies fossiles - ce qui, du même coup, rendrait les énergies renouvelables beaucoup plus concurrentielles.

C'est tout pour le moment. Je n'aborderai pas le développement durable et l'organisation de la société : des sujets beaucoup trop lourds en cette heure si tardive...

Bonne nuit !

Alex
* * *
Bonjour Alex !

Du lithium pour 15 ans si l'on en garnit les piles de tous les véhicules actuels, ça, ça me donne tout un coup ! Bonne info de ta part, et merci ! Pourtant, ne recycle-t-on pas déjà ces piles? Évidemment, d'autres véhicules s'ajouteront à ceux déjà existants : sérieux problème ! Ce qui me rappelle mon article sur la disparition de certains minéraux... qui résulte, en fait, de leur "dissipation" dans la nature et de leur "immobilisation" dans nos sites d'enfouissement et nos biens usinés.


Je demeure par ailleurs fort étonné de ton topo sur la Chine et son potentiel éolien... Ce pays est-il venteux à ce point? Si tel est le cas, les Chinois n'auront pas de problème d'alimentation en énergie après avoir épuisé leur part de combustible nucléaire et leurs immenses réserves de charbon... s'ils savent contenir leur croissance d'ici là. Mais qu'en sera-t-il des pays moins venteux? Chacun devra faire avec ce qu'il a et selon ses moyens ou selon l'aide que lui apportera... «la communauté internationale».

D'autre part, je crois que la raréfaction et le bilan énergétique de l'extraction des dernières énergies fossiles deviendront tels que les énergies renouvelables en prendront inévitablement la relève. Nous n'avons et nous n'aurons d'ailleurs pas d'autres options, n'est-ce pas?

Mais, comme tu le laisses entendre en parlant «du défi olympien de tout environnementaliste», un problème se pose de façon très radicale : comment réorganiser nos sociétés en regard des possibilités et des limites inhérentes aux énergies renouvelables? Bref, nous aurons «un problème beaucoup plus large d'urbanisme, de mode de vie, d'économie...» Et je dis «très radicale» parce que je suppute que la transition se fera sur un très court laps de temps. Et l'on va sérieusement grincer des dents... si l'on ne planifie pas au mieux cette transition.

Bonne lecture et A+

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